Je ne savais pas combien de fois nous avions dis le mot « honte » en à peine quelques minutes. De sûr, nous l'avions au moins tous dis une fois et je commençais sérieusement à être censé avoir hotne de mes actes. En quoi était-ce honteux d'aider sa demie soeur ? En quoi était-ce honteux de dormir en pyjama ? Certes léger les vêtements mais nous étions chez nous, nous n'étions pas dans une série télé américaine à la con dans lesquelles les pyjamas sont encore plus classes qu'une robe de soirée. Bref. Il était temps d'en remettre une couche. Je ricanais au nez de l'irlandais et m'apprêtais à reprendre le mot qui fusait depuis tout à l'heure.
« Si tu le dis... » dis-je avec désinvolture. « Pourtant, il me semble que Julianna a même deux ans de moins que moi... Mais dis donc papa Henry, tu ne sais même pas l'âge de ta fille ? La honte, ce n'est pas moi qui devrais la ressentir à ce moment, alors avant de faire ton malin… Réfléchis. » J'aurais eut un t-shirt ou une chemise, l'irlandais m'aurait attrapé par le col. Manque de bol, je n'en avais pas, il fit donc un pas menaçant vers moi mais je restais à ma place sans bouger. C'est alors que je m'attendais à entendre des nouvelles menaces de la part de mon beau père que la voix de Julianna résonna dans la pièce. Elle s'en prenait encore à ma mère. C'était bien la première fois que nous avions une cause commune. C'était à la fois bien de sentir un peu de support mais c'était également très gênant quand je support en question venait de Julianna. Encore une fois, la brunette n'avait pas tord. Ma mère n'était qu'une foutue égoïste mais ça... Je l'avais su dès le jour ou elle m'avait appelé Bingham.
Pourtant même si j'étais d'accord avec ce que Julianna disait, la fin de sa phrase me laissa perplexe. Merci de montrer à nos parents que je n'ai plus aucune vie sociale depuis que l'on est ici, voilà de quoi donner une nouvelle raison à Henry de croire que j'avais voulu sauter sur sa fille.

Puis pendant un court instant je ne prêtais plus vraiment attention à ce qu'il se passait. Henry ayant tourné la tête parce que Julianna venait de dire quelque chose de probablement.. touchant ? J'en profitais pour enfiler le jean qui se trouvait au sol. Peut-être qu'en étant vêtu, je serais un peu plus crédible ?
Lorsque je leur ordonnèrent de quitter la pièce, Julianna prit la parole encore une fois en ma faveur. Je n'en demandais pas tant, toutefois, j'étais content qu'elle le prenne comme ça. Ce qui aurait été bien, c'est que ma mère ne la coupe pas dans son récit pour me répondre. Une réponse violente qui eut le mérite de m'énerver. « Ma mère ? Tu te dis ma mère ? Explique moi un peu ce que tu as fais pour moi ? Ce qu'une mère normale fait pour ces enfants ?! Tu passes ton temps à m'appeler Bingham alors que tu sais que je déteste ça, tu n'as que du mépris pour moi et ce que je fais alors tu sais quoi ? Si tu ne veux pas partir d'ici c'est moi qui me barre parce que t'es pas prête d'entendre des excuses!  »
Sur ces dernière paroles je m'exécutais. Enfilais une chemise qui trainait sur ma chaise de bureau, je pris un mouchoir également pour essuyer le sang sur mon nez. Je mis un coup d'épaule à l'irlandais pour passer mais celui ci réagit au quart de tour, me plaquant contre le mur. Papa Henry semblait déboussolé. Il devait vouloir que je m'excuse au près de ma mère mais après ce que cette dernière avait dit sur la tenue de Julianna, il ne savait plus qui il devait protéger. « Je te conseil de me lâcher si tu ne veux pas d'ennuis avec la justice... » lui murmurais-je à son oreille tellement nous étions proches. Il me lâcha vraiment doucement et quand je pus enfin quitter la pièce, je lançais un regard derrière moi vers Julianna. Si elle voulait s'en aller et/ou me suivre, c'était le moment ou jamais. Ma mère allait bientôt se remettre du choc que je venais de lui affliger et elle allait probablement se venger.

Je me retenais à grande peine d'échanger un regard exaspéré avec Cassidy devant la stupidité de nos parents respectifs (trop de complicité, ce n'était pas bon non plus). Mais franchement... le fait d'être tombé amoureux l'un de l'autre, les avait rendus complètement con. Caitlin ayant toujours été un peu tarée, j'étais surtout choquée vis à vis de mon père. Que diable lui arrivait-il ? Franchement moi, qui adorait provoquer des disputes et avoir le dernier mot, je ne savais pas quoi à ajouter. Ils étaient en train de me tuer avec leur logique débile. Et étrangement, pour une fois, Cassidy se montrait plus réactif que moi. C'est donc dans un état second que je l'écoute reprendre mon père à propos de mon age. C'était un peu le monde à l'envers là... Mais je compris vite d'où venait l'erreur. Mon père connaissait parfaitement mon âge, il avait juste oublié l'anniversaire récent de Cassidy. Bref, de toute façon, on s'en foutait. Le but n'était pas de compter les ans pour savoir qui allait aller en prison. A vrai dire, mon seul véritable but, c'était que cette discussion absurde se termine. Malheureusement, les deux parties avaient encore des arguments. La dispute glissa doucement sur deux nouveaux protagonistes : Cassidy vs Caitlin. Génial, vraiment, avec tout ce que j'avais à dit à ma future belle mère, elle ne prenait même pas la peine de me répondre, je ne me sentais pas transparente du tout.... Et mon père n'avait même pas relevé ma remarque à propos de Birdie. Vraiment, c'est comme si on lui avait lavé le cerveau, il n'était plus le même. Mais je n'eus le temps de me repasser le film de feue notre extraordinaire relation père/fille, car Cassidy annonça dans un court laps de temps, son intention de partir et de coller un procès à mon père s'il ne le laissait pas passer. Je laissais tomber ma poker face, tout cela allait vraiment loin. N'était-on pas censé jouer à la famille parfaite dans une poignée de semaines pour le mariage du siècle ? C'était plus que mal parti, et autant je m'étais enrôlée dans la team Cassidy, autant je ne voulais pas qu'il s'en prenne de la sorte à mon père. Mais je n'eus pas le temps de réagir; il partait déjà, m'invitant d'un regard à le suivre.

J'hésitais brièvement, puis me rappelais que je n'avais aucune envie de rester avec les deux personnes présentes dans la chambre. Lançant un regard culpabilisant au possible à mon père, je partis à la suite de mon futur demi frère, non sans leur dire d'un air méprisant ce que je pensais d'eux. « Vous êtes nuls...vraiment. » . Cassidy n'était pas sur le palier, ni à l'étage du bas. Admirant sa rapidité à fuir la situation, je l'aperçu vite à travers la vitre de la porte, sans doute voulait-il fumer pour se cakmer. Enfilant mon long manteau par dessus, mon pyjama, je le rejoignis de mauvaise grâce. Certes nous devions discuter après toutes les choses bizarres qui étaient arrivées ce soir/cette nuit mais je n'étais plus pressée maintenant que la tension retombaient. « Tu as vraiment l'air ridicule dans ce manteau, on dirait un bibendum. Sauf que aucune personne saine d'esprit ne t'achèterait de pneus. » Je claquais la porte derrière moi, laissant un petit silence s'installer, tandis qu'il essayait d'allumer sa clope. Finalement, je brisais le silence, constatant qu'il ne me dirait rien. Malgré ce que j'allais essayer de faire croire, j'étais gênée. « Ce qui s'est passé tout à l'heure... tu sais nous dans le même lit et nous semblant presque alliés... On a qu'à dire qu'on en parle plus jamais, ça sera mieux pour nous... Je ne sais pas ce qui nous a pris. Je veux dire, ça a été gentil de m'aider... Mais on sait tous les deux que ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne ordinairement...  » Puis abandonnant mon sérieux, je partis dans des attaques plus ou moins ironique, pour bien lui montrer que je voulais que rien ne change dans notre relation. « Je suis déjà certaine que je vais en faire des cauchemars. Il n'y a pas assez d'alcool dans le monde pour me faire oublier que j'ai dormi dans tes bras vraiment... Alors si tu as quelque chose à dire, c'est maintenant ou jamais... » .

C'était bien la dernière fois que j'étais gentil avec Julianna. Je m'en faisais la promesse solennelle. Même si j'avais apprécié cette nuit sans conflit, ça ne devait plus jamais se reproduire. Qui sait jusqu’où ça pourrait allé si une prochaine fois de ce genre avait lieu. Je ne voulais pas le savoir. C'était donc pour cela qu'il fallait que l'on ait une discussion et c'était également pour cela que je l'invitais à me suivre avant que la querelle familiale reprenne. Sans vraiment faire attention si elle me suivait, je descendis les escaliers en faisant des rapides sauts agiles. J'enfilais ma paire de Converses qui trainait ainsi que mon énorme manteau. Je ne savais pas combien de temps j'allais rester dehors alors autant être prudent. Clope au bec, j'essayais désespérément de l'allumer mais le vent et le peu de gaz de mon briquet semblaient vouloir m'en empêcher. J'entendis la porte s'ouvrir derrière moi et je savais que c'était Julianna. Si c'était Henry ou ma mère, ils auraient ouvert la porte de façon bien plus rapide et violente. J'étais bien content qu'elle m'ait suivie. Nous devions parler et la jeune demoiselle ne se fit pas prier pour l'ouvrir. Critiquant. Me critiquant. Le seul truc qu'elle sache faire à la perfection, avouons le. Je ne répondis pas. Elle savait très bien que je n'aimais pas être ici et que ce manteau hideux que j'étais obligé de porter me rappelais à quel point je détestais ce pays. Je parvins enfin à allumer ma cigarette, ce qui fut à la fois un soulagement et une nouvelle victoire contre le vent froid du Canada.
Ordinairement. Julianna utilisa ce mot qui me fit vraiment réagir. C'était bien cela. Comme si nous étions des machines formatées pour s'envoyer chier et se faire les pires crasses du monde. Comme si cette nuit nous avions eut un bug qui nous avait rapproché. Je ne savais même plus quoi penser parce que même si nous arrêtons de parler de cet évènement, ce n'était pas pour autant que j'étais prêt à l'oublier. Je m'étais réveillé et je l'avais serré un peu plus contre moi. Que devais-je en conclure ? Je n'en avais pas la moindre idée.

« Tu n'en penses pas un mot de comme quoi tu vas faire des cauchemars, j'en suis sûr. Mais oui j'ai quelque chose à dire... La prochaine fois qu'il y a un orage tu peux te prendre un éclair en pleine gueule que j'en aurais rien à foutre. » C'était violent. Mais c'était comme ça que l'on fonctionnait ordinairement. Et puis... J'avais eu le visage bien amoché par mon beau père alors je n'étais pas prêt de me rapprocher de Julianna. Cette fille de toute façon, c'était le mal incarné. Je touchais mon nez avec ma main gauche, la droite étant occupée à tenir ma cigarette et je sentis que j'avais arrêté de saigner. C'était un bon signe... Il ne devait rester que quelques croûte de sang séché mais je n'avais plus de douleur, j'en conclus donc que mon nez n'était pas cassé.
« Je sens que le mariage sera épique... Vivement que ce soit terminé, qu'on ait plus à trainer ensemble. »